Mais pourquoi diable le cinéma ne réussit-il pas (ou rarement) à présenter le libertinage et l’échangisme tels qu’ils sont, avant toute chose ? Une quête de plaisirs et de liberté. Car, dans les salles obscures, l’échangisme fait bien souvent froid dans le dos. Pourquoi le film échangiste tourne-t-il si régulièrement au film d’horreur ?
Libertinage « historique » et cinémaPremière modalité pour parler sexe, libertinage échangisme et sexualités de groupe sur grand-écran, le film historique. Ah ! l’alibi historique ! Quoi de plus pratique que l’Antiquité, la Renaissance ou les Lumières pour exposer le vice de nos glorieux anciens. Combien de Messaline, combien de biopics du Marquis de Sade ou du bon roi Henri IV (jusqu’à 30 ans, il croyait que c’était un os), montrent la débauche des temps anciens ?
Le film historique, ou l’échangisme sans se mouiller. De Le Libertin à Rochester, le dernier des libertins, la partouze se joue en costumes d’époque, droit de cuissage et autres inégalités sociales autant qu’essor de la libre-pensée aidant grandement à dévergonder la donzelle.
Ce monstre qu’on appelle échangismePour l’époque contemporaine, c’est encore une autre paire de manches. Passons sur Eyes Wide Shut qui, outre une esthétique de l’orgie intéressante, a de quoi laisser circonspect (pour le moins) n’importe quel libertin ou libertine. Le reste de la filmographie de l’échangisme ressemble davantage à une enquête à charge contre toute forme de libertinage qu’à une promenade de santé érotique.
Du bon gros thriller psychologique (Closer) au film d’auteur pas moins psychologique (Happy Few), les réalisateurs semblent n’avoir de cesse que de dénoncer les risques insensés (forcément insensés) que prennent les couples s’adonnant à une forme ou à une autre d’échangisme.
Ajoutez-y Ice Storm, et vous verrez comment la décrépitude attend quiconque, quelque couple que ce soit, qui s’aventure sur le chemin semé d’embûches de la liberté sexuelle. Au début, tout va bien, mais plus dur sera la chute. Allez ! Une vague note d’optimisme dans Les Textiles, comédie qui, après s’être bien foutu du naturisme, laisse un petit espoir à la quête de liberté sexuelle…
Shortbus et Peindre ou faire l’amour : les réussitesRestent deux films, deux moments de cinéma qui font la part belle à l’échangisme et au libertinage sans pour autant sombrer dans le pathétique. Shortbus et Peindre ou faire l’amour parlent, pour l’un, de libertinage en club, pour l’autre de libertinage en privé.
Dans les deux cas, rien ne va de soi. Rien ne se fait avec le naturel d’un dîner entre amis ou d’une sortie au cinéma. Tout est compliqué, complexe, différent. On y suit des personnages et des couples (hétéros ou homos dans Shortbus) qui ont des doutes, vivent des drames, tentent de réparer leurs cassures intérieures…
Mais au final, c’est la vie qui émerge de ce libertinage là. Sans jugement de valeurs, sans condamnation inéluctable aux vicissitudes de la jalousie et du remord. Alors, peut-être que le cinéma n’est pas définitivement réac’
Les filmsIce Storm, d’Ang Lee, 1997 (USA)
Eyes Wide Shut, de Stanley Kubrick, 1998 (GB)
Le Libertin, de Gabriel Aghion, 2000 (France)
Les Textiles, de Franck Landron, 2004 (France)
Peindre ou faire l’amour, des frères Larrieu, 2005 ( France)
Closer, de Mike Nichols, 2005 (USA)
Rochester, le dernier des libertins, de Laurence Dunmore, 2006 (GB)
Shortbus, de John Cameron Mitchell, 2006 (USA)
Happy Few, d’Antony Cordier, 2010 (France)